La Madone examinée

"Il ne faut pas rechercher dans cette statue ces proportions académiques et cette forme élancée , étudiée, qui frise la mondanité, qu'on retrouve trop souvent aujourd'hui dans des milliers d'images que nous livrent l'industrie et le commerce "à l'expression d'une doucereuse fadeur qui cherche le joli  pour plaire à une petite église de boudoir"(Viollet le Duc)".

A ne pas en douter, notre bon chanoine Clément ne dissimulait pas ses idées quant aux canons esthétiques de son époque!

Il partageait d'ailleurs davantage l'idée d'un des premiers historiens de la cathédrale qui avouait qu'"il rayonne autour des deux têtes des statues comme un parfum séculaire de prières exaucées, qui impressionne vivement le pieux visiteur!".

Voici comme le chanoine décrit cette statue noire qu'il soupçonne être en bois de merisier sauvage :

La Vierge est assise, la tête légèrement inclinée. elle paraît avoir de 35 à 40 ans; Son visage [...] est empreint d'une certaine bonhomie faite d'un heureux mélange de sérieuse gravité, de douceur et de maternelle bonté.

Les traits forts et allongés du visage amaigri respirent pourtant de l'énergie et quelque chose au masculin.

Les yeux, comme dans les statues de l'époque romane sont très saillants et recouverts d'une matière blanche qui les fait paraître émaillés et rappellent certains bronzes gallo-romains et même les ornements mérovingiens.

Entre les arcades sourcilières très prononcées, le nez est long et droit. la chevelure est cachée par la coiffure; les doigts très allongés et raides retiennent l'Enfant Jésus sur le genou droit de Marie. La main gauche tient la base d'un lys aujourd'hui brisé.

Son vêtement est une sorte de péplum ou chasuble qui descend au-dessous des genoux, entrant par la tête, qu'elle recouvre, en mode de voile, d'un grand capuchon fort semblable à la cape antique de notre province[...]. Une robe ou tunique tombe à gros plis droits jusqu'au pieds, qui sont posés sur un escabeau plus étroit que le siège.

L'Enfant Jésus : de la main gauche, il appuie le livre des Évangiles contre sa poitrine, tandis que de la main droite - refaite postérieurement - il bénit, de l'index et du médium ouverts selon le rite latin. il semble vêtu d'une robe et d'une tunique. Les pieds - qui ont été refaits- sont nus. la chevelure très courte et peu ondulée, rappelle par sa raideur, la coiffure des gallo-romains. La tête, qui a les traits un peu forts, a une parfaite ressemblance avec celle de sa mère et paraît plutôt celle d'un jeune homme que celle d'un enfant.

Le siège ou trône sur lequel la Vierge est assise est formé de cinq pans assemblées au moyen de mortaises et de chevilles.

Il se compose de deux étages, ornés de chaque côté de deux arcatures en mitre, typiques de nombreuses églises bourbonnaises anciennes, séparées dans l'étage supérieur, par des demi colonnes engagées que terminaient autrefois des boules aplaties; deux tores grossiers servent de chapiteaux aux colonnes.

Avant la restauration de la statue en 1854, les membres du congrès archéologiques ont lu au dos du siège cette inscription incomplète : "Ecce novum signum...conceptit...Virgo"

Enfin, comme tout historien, le chanoine Clément avait le sens du détail à l'extrême et loin d'en faire un guide touristique, il va, dans son ouvrage jusqu'à donner les mensurations de la statue de manière très complète. Je ne résiste pas au plaisir de vous les donner :

L'ensemble, en excluant le socle ou piédestal contemporain mesure 0,85m de hauteur, sur 0,37 m de hauteur et 0,15m de profondeur.

La Vierge assise mesure 0,66m de hauteur et 0,31 m de largeur aux épaules.

L'Enfant Jésus assis, a 0,39 m de hauteur sur 0,15 m de largeur.

Le siège a 0,50 m de hauteur sur un développement de 0,75 m.

L'Enfant Jésus est éloigné de sa mère de 0,055 m, et la Vierge, de chaque panneau du siège, de 0,021 m au dos et 0,01 m sur les côtés.

Si vous le voulez bien, nous continuerons notre voyage dans le temps demain avec les bienfaits et miracles qui ont valu à cette vierge le nom de "Madone miraculeuse".